Lettre à M@demoiselle

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Bonjour M@demoiselle,

M@demoiselle, il faut qu’on parle.
J’atteindrai un âge canonique dans quelques jours.
Philippine, jamais avare de (plus ou moins) bons conseils, m’a suggéré de lire les « blogs de mamans » comme on dit et y trouver des activités Montessori que je pourrais appliquer pour Simon.
J’atteindrai un âge canonique dont la coquetterie me force à taire le nombre de bougies sur l’exquis gâteau qu’aura préparé Hortense pour moi et en matière d’éducation j’en ai vu de belles. Je veux dire, M@demoiselle, j’ai vu des tas de modes, des tas de décennies, des tas de parents. Il y en a qui allaient écouter Edith Piaf à l’Olympia habillés tout de gris foncé, il y en a qui portaient les cheveux longs avec des foulards dedans, il y en a qui partaient travailler le matin en costard-cravate rose ou en tailleur saumon pur nylon… Certains n’avaient pas choisi d’être parents, d’autres laissaient faire la nature, d’autres encore avaient pu contrôler les naissances. Certains étaient soucieux de leur progéniture, même s’ils ne la voulaient pas ; d’autres pensaient qu’elle s’élèverait avec de l’amour, de l’eau fraîche et quelques joints ; d’autres encore la voyaient parfois comme une charge financière et une charge pour leur promotion sociale.
Mais écoute, M@demoiselle, aucun ne se prenait la tête comme toi pour des broutilles et ne se regardait autant le nombril en se demandant s’il était un bon parent car il couchait son fils au plus tard à 20h30 et avait dit à sa fille, un jour de grande colère, qu’elle sentait la sardine. Aucun ne s’autoflagellait ou ne s’autocongratulait en permanence sur son rôle parental.
Tu cherches à éduquer qui, toi ? Ton enfant ou toi-même ?
Alors, on est bien d’accord, M@demoiselle, tous ces petits rituels et ces petits détails tangibles pour toi, et dont tu n’auras que faire dans dix ans, te permettent surtout aujourd’hui de te rassurer. Parce que dans le fond tu es une bonne maman, une maman aimante comme 99% des mamans (Pierrette ma bru et Mélanie ma petite-fille exceptées), je n’en doute pas, et toi non plus tu ne devrais pas en douter.
Alors, on est bien d’accord, M@demoiselle, arrête de lire les forums, les blogs d’autres mamans où chacune montre comme son utérus est le plus beau, arrête de te mettre inutilement une pression d’enfer (et par extension possible à tes enfants aussi), garde tout ce sérieux pour les véritables épreuves ; va faire un tour dehors avec tes petits, rigole, joue avec eux seulement si tu en as envie, là où il n’y aura pas d’autres mamans pour parler de leurs recettes de petits pots bio et de débats sur l’intérêt pédagogique ou non des tablettes pour les moins de seize ans. Et laisse tes enfants t’apprendre à être une maman, la leur. Ca te fera sûrement du bien. Et peut-être à eux aussi.

Bien le bonsoir, M@demoiselle.

Edmée

L’idée saugrenue de Philippine

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Philippine nous a à nouveau conseillées. A croire que c’est son blog !

« Tiens, vous devriez profiter de votre renommée virtuelle pour écrire un livre, toutes les deux ! », qu’elle a dit. « Toi mamie, tu aimes Barbara Cartland et France loisirs, tu n’as qu’à écrire un roman sur la télé à la sauce américaine. Et toi, Edmée, avec Simon, tu as toute la légitimité nécessaire pour t’associer au vétérinaire de Villers-sur-Mer pour faire un ouvrage sur les animaux domestiques. »

« Mais avant, souvenez-vous que vous devez développer votre visibilité sur les réseaux sociaux. On n’édite que ceux qui ont déjà des clients, des lecteurs je veux dire, potentiels. Pensez que votre futur éditeur, au fait ce ne sera ni Gallimard ni Dunod encore moins PUF, c’est comme une banque qui ne prête qu’aux riches. Il ne va pas chercher plus loin. Son crédo, c’est la rentabilité, la rentabilité et encore la rentabilité.

Ensuite il faudra que vous assuriez votre promotion. C’est pas votre éditeur qui va s’en charger… N’oubliez pas qu’il vous aura choisies parce que vous aviez une cible toute dévouée et un filon à exploiter. Faudra gérer.
Donc, par exemple, vous inonderez les autres blogs, trouvez-vous des copines plutôt cotées, oui Edmée même Dédé1938, de vos bouquins pour qu’en soient faites des critiques positives. Vous retweeterez tous les tweets où on vous fera de la pub. Vous demanderez à vos lectrices de photographier votre livre dans les grandes surfaces et d’en poster les clichés sur leur Amstramgram. Au fait, vous n’avez toujours pas créé de compte, j’ai vu… Vous attendez quoi ?! »

On commençait à se faire à moitié engueuler pour un machin à la pic et pic et colégram ! A nos âges ! J’aime bien Philippine mais franchement, là, j’ai trouvé qu’elle exagérait ! Alors je suis partie, Simon sous le bras, et je suis allée à l’improviste chez Charlotte pour lui lire une vieille histoire d’ours à la couverture en cuir et au papier jauni, que j’avais trouvée chez un antiquaire à Deauville pendant mon séjour chez Pierrette.

La médaille de Simon

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Ma bonne Hortense m’avait convaincue.
Je fis passer le concours de tests de QI à Simon. Simon c’est mon chien. Pour ceux qui auraient l’audace de l’avoir oublié.
Un caniche.
C’est forcément très très intelligent. Ca aboie face aux emmerdeurs. Donc tout le temps. Ca accepte de porter un manteau l’hiver. Pas comme mes petits-enfants quand ils avaient entre deux et cinq ans. Ca vient me lécher dans les mains. Sans rien attendre en retour.

Avant de me rendre à l’Institut pour Animaux Très Spéciaux, j’emmenai Simon chez la toiletteuse pour une belle coupe « lion continental » dans le but d’impressionner les autres zèbres présents.
Arrivés, Cathy voulut l’amadouer avec un morceau de sucre. Avec effroi je m’écriai « Surtout pas de sucre raffiné, ça bousille les neurones ! Vous ne connaissez donc pas la Stévia ???!!! Cathy, ma petite Cathy, dans sa tendre enfance, je préparais moi-même ses petits plats à Simon. Je peux vous le dire à vous, vous comprendrez, je lui ai même donné au biberon physiologique sans Bisphénol A – j’étais déjà bien renseignée à l’époque – le lait maternel d’une voisine qui avait besoin de sous. Ca commence par là, ma petite Cathy… Une nourriture saine, gageure pour plus tard d’une bonne santé physique et mentale ! ».
La pauvre Cathy n’ayant qu’un CAP, je me rendis vite compte qu’elle n’était pas en mesure de faire la différence entre un biberon de base et un biberon anatomique. Tout juste savait-elle couper le poil de mon Simon avec application sans atteindre la pleine conscience ! Mais elle n’y pouvait rien, la malheureuse. Ses parents, lui maçon, elle caissière, ne lui avaient légué de gêne supérieur, si ce n’est des yeux bleus vitreux à caractère récessif.
Je vous dis ça, sans condescendance aucune. Il n’y a pas de sot métier. D’ailleurs un de mes meilleurs amis est peintre. Artiste peintre.

Une fois sur place, Simon sut tout de suite montrer à ses concurrents qui était le maître.
Il joua mieux que quiconque au piano « La lettre à Elise » de Richard Clayderman et interpréta avec virtuosité en aboyant « L’amour en héritage » de Nana Mouskouri.
Il montra également qu’il savait parler le pékinois, le berger allemand et le terrier écossais sans la moindre pointe d’accent canichois.
Il réussit haut la patte tous les tests.
A ceci près…
Il fut éliminé sur l’épreuve des sauts d’obstacle, ces petits fonctionnaires de l’Institut, ayant estimé – à tort – que l’on peut placer le sport dans une catégorie intellectuelle ! Mens sana in corpore sano, tu parles, un peu désuète la citation !
Fort heureusement, après un coup de canne dans le tibia sonnant creux de l’examinateur principal, Simon remporta la médaille du chien au plus gros QI de France, soit l’équivalent hexagonal du prestigieux International Tootoo Intelligence Quotient.
Je suis sûre que Simon était content ; il dévora avec entrain sa pâté en rentrant.

Une photo de Simon est parue dans la gazette.
Hortense a envoyé un fax contenant une photocopie de l’article à Dédé1938.
J’ai placé la médaille dans un sous-verre qui trône sur le buffet à côté de la photo de mon Félix.
Je me sens fière de tout ce que j’ai fait depuis des années pour Simon.
Comme on remettra en jeu son titre l’année prochaine, on a commencé dès le lendemain les mathématiques. On tient la comptabilité de Cathy pour s’entraîner. En plus, ça l’aide, la pauvre fille.

Bits and Pieces #1287

Encore une semaine riche en rebondissements comme vous allez pouvoir le constater ! Hortense et moi sommes si heureuses de pouvoir les partager avec vous ! Merci pour votre fidélité.
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1. J’apprends à Simon à jouer du piano. Il est doué. Il connait déjà tout Richard Clayderman par coeur.

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2. Dédé1938 m’a encore plagiée. Cette fois-ci elle s’est acheté un chien. Si ça continue comme ça, elle va placer dans un de ses billets le mot « Vieilles », mot qu’Hortense, prévoyante, a déposé à l’INPI et on va lui faire un procès.

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3. Une filiale de Flunch m’a fait tester les services d’un cuisinier à domicile. Promis, je vous en reparle très bientôt ! (quand j’aurai récupéré de mon intoxication alimentaire)

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4. Hortense et moi avons eu un différend au sujet de la dégustation de porto dans une tasse.
On s’est mises finalement d’accord : « Peu importe le flacon pourvu qu’on ait l’ivresse ».

Et vous, vous avez passé une bonne semaine ?

Comment augmenter les visites de son blog

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Hier se tenait chez moi notre traditionnelle réunion hebdomadaire de bloguing. Pendant que les mères de famille se farcissent les allers-retours au solfège ou à la danse, Hortense et moi, qui envoyons promener Simon une petite heure dans le jardin en attendant, réfléchissons aux stratégies à mettre en place pour conquérir la blogosphère.

« L’heure est grave. », annonça ma chère Hortense, pourtant décontractée par le petit fond de Porto que je lui avais servi à 10h30 dans la tasse customisée qu’elle m’avait offerte.

« Philippine trouve que nous communiquons très mal. Très très mal. Par exemple, ma bien Edmée, votre précédent billet sur la défécation n’est pas assez universel m’a dit Philippine, et un tantinet graveleux. Nous savons toutes que vous avez raison dans le discours mais il s’agit de méthode. »

On aurait dit du Descartes (Philippine fait philo à la fac).

Hortense poursuivit « Si vous voulez augmenter vos statistiques et berner votre public, il ne faut pas se contenter d’un concours comme en font toutes les blogueuses a ajouté Philippine. Il faut commenter chez les grosses blogueuses, les nommer en leur léchant le derche dans vos articles pour qu’elles vous citent en retour. Il faut vous associer avec Dédé1938 exceptionnellement pour mettre en place un rendez-vous à thème régulier. Il faut vendre du rêve aussi. Vous avez au moins un compte Amstramgram ? Il faut absolument vous créer un compte Amstramgram. Vous êtes sur Twitter. Mais c’est révolu Twitter ! Complètement démodé ! Il faut de la tendance ! Des photos retouchées ! De l’intimité scénarisée ! Faites-les fantasmer vos lectrices ! Montrez-leur que votre vie est géniale, que vous êtes géniales ! Montrez-leur qu’elles méritent de vous aimer et qu’elles ont la chance de pouvoir s’évader de leur vie de merde grâce à votre vie arc-en-ciel !!! ».

J’étais douchée par la diatribe de ma consoeur qui sentait agréablement la rose et embaumait la véranda.

« Voilà, ma bien Edmée, en premier lieu, je crois qu’il nous faudrait en effet un compte Amstramgram. Avez-vous déjà quelques idées ? » a fini par conclure Hortense.

« Ahem, je pense qu’on pourrait tout d’abord mettre en ligne la recette du Purple Smoothie « pruneaux pour le transit, cassis pour la vision, betterave pour le teint ».

– Très bonne idée ! Très très bonne idée ! Ne pourriez-vous pas également mettre en scène Charlotte avec une couronne sur la tête et une baguette de fée dans le cul ? Ca plairait j’en suis sûre. Je me suis laissé dire que les déguisements pour enfant étaient toujours en vogue.

– Ca m’ennuie un peu d’instrumentaliser Charlotte. Mais si c’est fait dans un but noble, après tout, pourquoi pas.

– Mais non, ma bien Edmée, ce n’est pas de l’instrumentalisation, c’est de l’art au service des pauvres âmes.

– Ah, dans ce cas, effectivement… Merci de me le rappeler, ma chère Hortense. Est-ce que je cherche une couronne avec quelques diamants ?

– Absolument ! Mais écrivez surtout que vous l’avez achetée de seconde main. Mettez-vous à la portée du peuple.

– Il me semble que des selfies seraient également les bienvenus. En plus, j’adore ça, moi, me montrer sous toutes les coutures, pas vous ?

– Oh si ! On va bien s’amuser ! Je vous l’avais dit, ma bien Edmée, que Philippine s’y connaissait en blogs etc. ! En plus, après ses cours elle fait du porte à porte pour vendre des aspirateurs ; elle est très convaincante. Elle me dit « Tu sais mamie, quelquefois, ça me donne la nausée. Mais bon, je ne suis pas Sartre ! Alors je continue. ».

– Oui oui… Excusez-moi, Hortense, j’entends Simon gratter à la porte. C’est le signal de fin de réunion. Dites-moi, vous resterez bien déjeuner avec nous pour une fois, j’ai déniché de quoi faire tout un repas équitable pour aider les boliviennes. »

Je pense donc je c…

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J’ai dit à Hortense « Vous savez, Hortense, à la fin, on est tous un tube digestif. Voilà notre perspective. ».

Elle a gloussé en me relatant l’affaire de sa commission matinale (Hortense est plutôt du matin). Elle était contente : expulsion facile, belle couleur, consistance agréable, odeur sympathique.

Je ne m’explique pas pourquoi, Mélanie, jamais avare des exploits de sa fille Charlotte en la matière, semble dégoûtée lorsqu’il s’agit de mon transit à moi. Je vois bien sa mine défaite sous son intérêt feint.

En quoi devrais-je cacher mes soucis qui me dévorent les entrailles et m’irritent l’anus ?

N’ai-je pas écouté attentivement ses histoires d’hygiène naturelle infantile où Mélanie, la cuvette sous le derrière de son nouveau-né, cherchait à détecter les rictus précédant la bombe ? N’ai-je pas acquiescé de bonne grâce, quand elle en a eu assez de porter son enfant nue jour et nuit en cuvette, en la voyant renifler le moindre fumet du fessier de Charlotte au travers de la couche bio et l’entendre me raconter « Ca m’inquiète, elle a la diarrhée depuis 8h26 ? ». Le peu de fois où j’ai gardé Charlotte, n’ai-je pas dû décrire, par le menu détail, la fréquence de ses selles en cochant de surcroît leur coloris précis sur un cercle chromatique allant du noir ébène au jaune-citron ?

En quoi, mes problèmes à moi, qui suis aujourd’hui sans dents et sans trop de cheveux, auraient-ils moins d’importance que ceux de mon arrière-petite-fillotte et qui préoccupaient grandement sa mère au temps où Charlotte ne risquait ni d’attraper des poux ni de se mordre la langue ? Et encore, je ne demande pas à ce que l’on s’extasie ou que l’on m’applaudisse après chaque passage aux waters !

En définitive, à la fin, on n’est qu’un intestin pour soi-même et une crotte pour les autres. C’est tout ce que j’ai à dire.